Commençons par des dessins réalisés par deux enfants.

Prenons Tom, 4 ans. Paris, quartier des ambassades (16ème arrondissement). Ce gamin passait le gros de son temps allongé dans un fauteuil, la télécommande du téléviseur à la main, changeant de chaîne au gré de son humeur.

illettrisme illettrisme
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Ce qu'on peut en dire est qu'il a fallu un peu tricher pour rendre rendre les tracés plus visibles. Le fait est que ce gamin âgé de quatre ans n'avait jamais tenu un crayon auparavant et avait très peu de force dans le bras droit, au point qu'il devait reposer son bras toutes les 3-4 minutes à peu près. J'ai même dû lui tenir la main plus d'une fois, notamment pour réaliser des arrondis. Par ailleurs, il s'est avéré impossible d'entreprendre la moindre conversation avec un enfant visiblement mutique.

Quant à la petite Samira, elle vivait quasiment dans le même quartier huppé de l'ouest parisien, à ceci près que sa mère, femme de ménage, occupait un local réservé aux gens de maison. Cette gamine disposait de nombreux crayons et passait une grande part de son temps libre à griffonner diverses choses, à l'image de ce qui suit : une jeune mariée dans sa robe de cérémonie.

Les deux images suivantes sont des exercices de mémorisation de syllabes : je présentais le mot à l'enfant et le masquais immédiatement. Question : avez-vous une idée de l'âge relatif de ces deux enfants ?

lire-ecrire
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Réponse à la question précédente : aussi surprenant que cela puisse paraître, ces deux gamins ont le même âge : quatre ans, mais n'affichent visiblement pas du tout le même stade de développement psychomoteur et cognitif ; et j'estime qu'il y avait en ce domaine deux bonnes années d'écart entre nos deux gamins.

Faites le test dans une école maternelle, où que ce soit dans le monde entre, d'une part, des enfants issus de milieux socio-culturels "aisés" - vivant dans des logements où il y a des livres, des instruments de musique, logements dont les occupants visitent bibliothèques, musées et salles de concert - et, d'autre part, des enfants de classes sociales moins "avantagées" - élevés par des parents peu instruits, voire illettrés ou analphabètes, des enfants passant plus de temps à jouer aux jeux vidéo qu'à lire des livres et à fréquenter des bibliothèques - et vous aurez exactement le même type de décalage que celui affiché plus haut.

Mais j'en entends qui vont me rétorquer : "Comment expliquer la différence entre Tom, élevé dans une famille huppée - le père, qui devait être ambassadeur, se déplaçait dans une luxueuse berline avec chauffeur - et Samira, la fille d'une femme de ménage ? La situation inverse n'aurait-elle pas été plus logique ?"

Certes, la mère de la petite Samira n'était pas très instruite, mais, par chance pour la gamine :

1) elle disposait d'une grosse panoplie de crayons et de papier, ce qui lui a permis de renforcer et son bras et son cerveau ;

2) là où moult garçons reçoivent des consoles de jeu vidéo, Samira avait reçu de sa mère un mini-ordinateur parlant grâce auquel elle a appris toutes les lettres de l'alphabet imprimé ;

3) elle avait sur le même palier un voisin (moi-même) qui s'est appliqué à lui apprendre moult choses, à commencer par les lettres manuscrites...

 

 

 

 
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